•  Amis artistes, amis esthètes !

     Il y a cette image, que je croise de temps en temps (souvent en hiver, par ailleurs) depuis que je suis toute petite, et qui me fascine (oui, tout me fascine : c'est mon naturel élan d'affection pour le monde qui m'entoure, je le trouve merveilleux), et dont je me demande parfois combien d'autres la remarquent. Et comme les belles choses sont faites pour être partagées...

     Les soirs d'hiver, ou les matins d'hiver, quand il fait encore nuit noire et qu'il a plu récemment, le goudron et les pavés brillent de mille reflets. À chacun de mes pas ces éclats se déplacent sur les aspérités du sol, comme si la lumière que me renvoyait le sol – milliers de minuscules gouttes d'eau illuminées, comme autant d'astres éclos sous mes pieds –, cette lumière orangée et si belle des lampadaires qui se reflète sur le sol comme quelque chose qui jaillirait circulairement sur lui, comme si ces éclats lumières n'étaient là que pour me donner la surprenante impression que sous mes pieds, à chaque instant, éclate un feu d'artifice qui se renouvelle à chacun de mes mouvements. Sur le long de toute ma route, je garderai ainsi les yeux baissés, pour regarder avidement ces feux d'artifices imaginaires exploser en m'accompagnant sur le goudron.

     Les soirs d'hiver, ou les matins d'hiver, quand il fait encore nuit noire et qu'il a plu récemment, je suis fascinée par cette vision qui me jaillit à la figure et dont j'ai parfois l'impression qu'unique et toute à moi, elle est l'un des liens des complicité secrète qui m'unit avec le reste du monde. Savoir si je me leurre ou non est sans importance : j'y prendrai toujours plaisir, que vous voyez aussi ces feux d'artifice ou non.


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  •  De temps en temps, j’essaye d’explorer Eklablog, pour comprendre un peu comment fonctionne la communauté. J’ai visité quelques profils et blogs, dont la plupart parlaient de dessins et de mangas le tout entrecoupé de fautes d’orthographes – mais mes statistiques sur les blogs que j’ai visités ne sont pas le sujet du jour. Je suis tombée, à deux reprises, sur des profils qui m’ont laissée perplexe (je ne mettrai pas de lien parce que c'est trop casse-pieds de faire ça sur portable, et que de toute façon les intéressés ont rectifié leur erreur).

     Le premier, donc, commençait par cette phrase fabuleuse : « And can the fate be to you favorable ! », ce qui est absolument ignoble pour quiconque parle un peu anglais (pour les non-anglicistes, en français, ça donnerait : « Et peut la destinée être pour toi favorable ! »).

     Le second, quant à lui, se contentait d’affirmer avoir la réponse à « Pourquoi un corbeau ressemble à un bureau ? » (une fameuse devinette dont personne ne connaît la réponse, dans Alice au Pays des Merveilles de Lewis Carroll : c’est mon livre préféré, juste après De l’Autre Côté du Miroir, qui constitue une suite au premier) : la solution résiderait dans le fait que les deux mots riment.

     

     Présenté comme ça, on n’a pas l’impression que les deux se ressemblent pour un sou : mais en fait, les deux font référence à des œuvres littéraires écrites en anglais. Et les deux ont manifestement lu la version française de ces œuvres – ce que je ne leur reproche pas, parce que ce n’est pas facile de sauter le cap et de lire en langue originale. Néanmoins, en tant que les deux avaient tort, j’ai été agacée (c’est mon penchant élitiste-intolérant qui ressort).

     

     « And can the fate be to you favorable ! » C’est dégueulasse comme traduction, et on dirait fort du Google Traduction. Traduire une phrase d’une langue à un autre, ce n’est pas appliquer bêtement les mots qui correspondent (ou plutôt pourraient correspondre), et hop, c’est bon. Quand on passe d’une langue à une autre, on entre dans un autre système de pensée, avec des mots qui ont d’autres résonances (même si de nombreuses résonances se retrouvent d’une langue à l’autre, ce n’est en général pas le cas). Et on formule les choses différemment. On ne traduira pas « Gryffondor » en français par « Clawongold » [Griffe-on-or] en anglais. En anglais, c’est « Gryffindor ». En traduisant en français on a quasiment gardé le même mot, parce que le mot fait écho chez nous aussi, et que la sonorité est importante. Si vous voulez avoir l’air stylé en parlant anglais, vous direz « Gryffindor », et pas « Clawongold », parce que tout bêtement, c’est con de jouer au téléphone arabe quand on peut, en cherchant rapidement sur Internet, retrouver la version originale de la chose. Donc, pour information, pour dire « Et puisse le sort vous être favorable » en version originale, on dira « May the odd be ever in your favour ! » (vous noterez la rime en ever/favour).

     

     En ce qui concerne le corbeau et le bureau, c’est plus subtil. A première vue, ça fait sens. Mais là encore, problème : nous nous situons dans une traduction (laquelle, je ne sais pas, je crois qu’elles ont toutes traduit la devinette ainsi ; mais il y a beaucoup de traductions, et pour une œuvre comme celle-ci, la traduction change tout ; aussi j’en profite pour défendre ma préférée : lisez la traduction de Henri Parisot, c’est l’originale et la meilleure ! Et évitez à tout prix celle de Jacques Papy). La véritable version de la devinette, c’est : « Why is a raven like a writing-desk ? » (et j’ai vérifié, parce que ça m’a fait douter, rah). Aucune rime, comme vous pouvez le constater. L’erreur venait donc, ici, que la personne s’était permis d’analyser la devinette à la fois sur le fond et sur la forme, sans prendre en compte qu’il s’agissait d’une traduction, et non d’une version originale. (Pour la réponse à la devinette : la théorie la plus répandue dit que c’est parce que les deux ont des plumes, mais il se peut fort que la devinette n’ait tout simplement pas eu vocation à être résolue.)

     

     (Bon. Je ne blâme personne, hein. Moi aussi, dans ma jeunesse, j’ai fait des ignominies (j’écrivais « dilemne », avant). Ça arrive à tout le monde. Mais j’en profite pour placer un message de prévention : si vous aimez une œuvre, renseignez-vous sur sa version originale. Vous ne parlez peut-être pas la langue originale couramment, mais vous pouvez tout de même essayer de jeter un œil (surtout si vous connaissez déjà la traduction, ça fait vraiment progresser : si j’ai un aussi bon niveau en anglais, c’est grâce à Harry Potter), pour essayer (et puis c’est cool, quand on lit Harry Potter en anglais, de voir Ron demander à Lavande : « I’d like to see Uranus, too ! » [J’aimerais voir Uranus/ton anus, aussi !]). Même si c’est juste pour vous renseigner sur quelques mots, noms, expressions, et pas pour lire le livre en entier, non seulement ça pourra vous éviter des erreurs, mais en plus vous apprendrez des trucs. Une langue, ça ne s’apprend pas qu’au vocabulaire (et croyez bien que quand j’ai lu Harry Potter, je n’ai pas cherché TOUS les mots inconnus que je croisais !), ça s’apprend aussi par imprégnation.

     (On dirait que je vous fais la morale, là, mais pas du tout. Je voulais juste parler des langues, parce que l’exercice de la version (traduction d’une langue vers le français, exercice pratiqué dans les études supérieures) me fascine. Traduire, c’est le difficile exercice de faire sens, de faire son aussi, de faire résonance. Et c’est toujours imparfait - d'où la fascination pour une quête de perfection imaginaire qui fait sens par son cheminement, et non son aboutissement fictif.)

     

     Pour conclure sur Alice, puisque c’est cool : les jeux de mots sont génialissimes, cette œuvre est impossible à traduire (et c’est pour ça qu’elle a été tant de fois traduite : ça doit être le graal du traducteur !). Donc, si vous voulez profiter des subtilités, prenez une édition bilingue (avec Henri Parisot, le meilleureuh), ou alors au moins une édition avec des notes de traducteur. Vous serez bluffés.


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  •  C'est un truc rigolo mais je ne sais jamais quoi en faire, alors, tant que j'y suis, je crois que ça s'inscrit tout à fait dans la lignée de mes précédents articles — inutiles, sans intérêts, et ressemblant plus à des digressions bavardes qu'à autre chose.

     

     Prenez un nombre entre 1 et 9 inclus. Multipliez-le par 9. Maintenant que vous avez votre multiple de 9, multipliez-le par

    0 1 2 3 4 5 6 7   9

     (Oubliez pas d'enlever le 8.)

     

     Voilà. À l'époque où j'avais une calculatrice, je le faisais, de temps en temps, ce calcul. Il me fascine, je le trouve marrant. Mais je n'ai jamais réussi à trouver son utilité ou à aller plus loin avec.

     

    Passez une bonne journée.


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  •  J'ai eu, soudain, envie de relire des vieux textes que j'avais écrits. C'est un peu étrange, de se relire comme on lirait quelqu'un d'autre, avec le recul offert par le temps — et tout ce qu'il donne d'étranger au texte : c'est pour cela, sans doute, que le temps a toujours été mon meilleur juge. Ce n'était pas si mauvais que ça aurait pu l'être ; ce n'était pas non plus excellent. Je crois que ça me manque d'écrire — sans savoir tout à fait ce que je voudrais écrire. Il fut une époque où j'écrivais chaque jour, mais je crois que je me suis brûlé les ailes, à force d'écrire le même genre de choses. J'ai petit à petit cessé d'écrire : peut-être serait-il temps que je m'y remette — j'y pense, en tous cas.

     Mais trêve d'introspection foireuse : je me permets de livrer ici, comme substance d'article, un de ces textes que j'ai relus. J'ai joué le jeu, je donne ici le premier que j'ai relu, écrit il y a environ deux ans. Qui sait, si l'envie m'en prend, d'autres suivront...

     


     

    Lutte immémoriale

    C’était une vieille guerre, entre lui et son frère. Il ne se souvenait même plus de qui l’avait lancée, ni même de quand elle avait vraiment commencé. Cela faisait sans doute plusieurs millénaires. Ou peut-être même plus. Mais qu’importait de le savoir, après tout ? Ce qui importait, c’était qu’après tout ce temps passé à s’affronter sans relâche, ils étaient encore là, inchangés, piégés dans leur cycle éternel de victoires et de défaites. Un jeu qui ne voyait jamais de gagnant définitif : mais pas non plus de perdant. Ce qui ne les empêchait pas, ni l’un, ni l’autre, de continuer à essayer, encore et encore, lui de créer, son frère de détruire, sans jamais que la lassitude ne vienne s’y mêler. C’était un de ces combats d’honneur, qui ne se jouaient qu’avec le cœur et l’âme, un duel qui se valait plus par les brèves réussites qu’on arrachait à l’adversaire que par son issue dont l’importance, au fond, n’était qu’une illusion. Aussi, chaque fois que son frère venait piétiner tout son dur labeur de minutie, c’était sans déception qu’il attendait patiemment que son adversaire ait fini par s’épuiser puis céder pour reprendre le délicat tableau qu’il tentait de constituer. Un à un, il ramassait les morceaux de verre que son frère avait brisés, et il les essuyait doucement, avant de replacer les éclats sur sa toile, sans se précipiter, choisissant soigneusement leur agencement, qu’il avait fini par connaître par cœur avec les siècles. Mais, évidemment, son œuvre n’était jamais qu’une victoire éphémère, car son frère finissait toujours par revenir à la charge, anéantissant sans aucun état d’âme ce qui avait mis des heures à se reconstruire. Sa conception de la beauté était brutale et tyrannique, sans aucune considération pour la subtilité des jeux d’ombres, des formes abstraites et des nuances oniriques qu’il essayait de composer. Son frère ne savait rien de la douceur et du calme, de l’harmonie et de la paix ; il ne connaissait que le chaos, les bruits infernaux et la violence. Violence qu’il n’hésitait pas à user lors de leurs brèves altercations, lorsque la victoire de l’un se changeait en défaite, tandis que l’échec de l’autre devenait triomphe, ou bien le contraire. Ces conflits réguliers, qui les voyaient s’affronter aux coups, prenaient fréquemment des couleurs sanglantes, mais ils ne duraient jamais bien longtemps, se concluant généralement par la reddition de l’un ou de l’autre. Si c’était son frère, alors il déchirait la fragile toile et jetait tout à terre ; si c’était lui, alors il relevait la toile, la recousait, la réparait enfin. Et cette petite victoire de gagnée, toute incertaine et insignifiante qu’elle était, était ce qui lui était de plus cher au monde : car c’était elle qui lui assurait, non pas le repos et la tranquillité, mais l’assurance d’exister et de continuer à créer et recréer son œuvre, celle qui était sa raison d’être. Peut-être que cela ne pourrait jamais durer plus de quelques heures, mais cette pensée ne pouvait pas le rendre triste, car, ce qu’il préférait par-dessus tout dans ses réussites, c’était de pouvoir reconstruire ce qu’on lui avait détruit, s’affairant avec des gestes que l’habitude avaient rendus mécaniques sur ce qu’il tentait d’amener au plus près de la perfection. Et c’était toujours avec le sourire que la Nuit recollait sur sa toile noire les éclats de verre stellaire que son frère le Jour avait éparpillés à l’aube, reconstituant sans faillir son tableau céleste.


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  •  Déjà, c'est cool, la douche. Tu braques le jet d'eau sur toi, et l'eau coule et ruisselle sur ton corps, et tu es bien. Ta peau se détend et tu peux penser à tout un tas de trucs. Parfois, je m'imagine qu'après la mort, c'est une douche éternelle : que tu restes éternellement à laisser l'eau ruisseler sur toi, et que tu es zen, comme ça, sans rien d'autre que cet état agréable et la solitude, jusqu'à la fin des temps. Ça donne envie, presque.

     La douche, c'est le moment où - en général - on est seul, tranquille, et sans aucune perturbation extérieure, donc évidemment, c'est le moment idéal pour faire le bilan sur sa vie, divaguer et penser à tout un tas de projets qu'on ne fera sans doute jamais (ou bien s'imaginer qu'on est mort et que c'est ça qu'il y a après la mort : une douche éternelle).

     Mais trêve d'introduction foireuse. Un des éléments essentiels de la douche, c'est la température.

     

     Quand j'étais petite j'avais peur de me brûler, alors je me mettais au bout de la baignoire et je commençais par l'eau froide, avant d'ajouter de l'eau chaude jusqu'à avoir la température parfaite, mais doucement, parce que ça pouvait être très dangereux de se brûler avec de l'eau de la douche trop chaude.

     Puis j'ai grandi et j'ai fini par trouver que l'eau chaude c'était vachement agréable, et même que quand tu mets l'eau super-chaude après ton corps s'habitue et tu peux mettre l'eau encore plus chaude et tout jusqu'à ce que ça soit vraiment vraiment chaud. Et c'est vraiment chouette, quand l'eau est super-chaude et que t'as l'impression qu'elle fait fondre ton corps. Tu pourrais y rester des heures.

     Puis un jour, par curiosité, j'ai essayé de voir si on pouvait faire la même chose en mettant l'eau de plus en plus froide. Autant se le dire : ça détend moins. Et c'est plus dur de s'habituer. Mais ça revigore, ça rafraîchit, je me sentais vivante, après (comme quand on sort en hiver et qu'on a les joues toutes froides en rentrant). Alors, comme c'était pas cool (ahahah) de baisser la température progressivement, j'ai développé un planning de douche : au début, je mettais de l'eau chaude, puis pour me rincer, je mettais de l'eau encore plus chaude (parce que c'est vraiment trop agréable). Et les dix dernières secondes avant de sortir de la douche (et il fallait prendre son courage pour le faire, quand même), je baissais d'un coup la température, pour avoir de l'eau froide, voire très froide. Après ça, ce n'était plus difficile de sortir de la douche, et j'étais bel et bien revigorée.

     J'ai aussi eu une période de "température ambiguë". C'est une température ni chaude ni froide, juste assez chaude pour que ce ne soit pas froid, mais juste assez froide pour que ce ne soit pas chaud non plus. C'est une sensation assez étrange, et même assez désagréable au début (on n'a pas froid, mais on n'est pas bien non plus, quoi). Mais à force de l'utiliser (par volonté d'être brave et d'affronter toutes les températures de la douche - car je suis une fille courageuse et aventurière !), j'ai fini par m'habituer, et même à bien l'aimer, cette température ambiguë. Sans pour autant qu'elle remplace définitivement mon planning de chaud-très-chaud-froid.

     L'été, c'était douche froide sans hésiter. Je crois que la douche froide, c'était mon emblème ; quelque part je m'imaginais que ça forgeait le caractère, et puis, c'était aussi plaisant qu'un fou-rire - c'était vif.

     Et puis j'ai entamé mes études supérieures en classe préparatoire. J'ai continué mes douches froides, puis chaudes-très-chaudes-froides. Et l'hiver est arrivé, et j'ai vite cessé cette bravade. Il faisait froid le matin quand je me levais, et j'avais tout sauf le courage de passer par une douche froide - le bref sprint entre la douche et, 3m plus loin, le radiateur où je mettais ma serviette me suffisait. J'ai abandonné les douches froides au profit des douches brûlantes. C'était assez désagréable de devoir s'avouer à soi-même sa lâcheté, mais une douche est un moment agréable et ça aurait été stupide de le gâcher par audace du froid.

     Mais j'ai récemment découvert toute la beauté des douches brûlantes : quand je sors de la douche, et qu'il fait froid, l'eau sur mon corps s'évapore en des volutes de vapeur, arabesques de fumée blanche autour de moi, et c'est assez fascinant pour que, l'instant de quelques secondes, j'en oublie d'aller chercher ma serviette, et que je me dise : "Woah. Je suis un dragon !"

     

     Donc, c'est cool, la douche. Qu'importe la température : la douche, à l'instar de chaque instant, a son charme. Même ces instants où tu grelottes en sprintant vers ta serviette 3m plus loin sur le radiateur peuvent être beaux, si tu sais comment les regarder (et évidemment, si tu as pris une douche assez chaude et qu'il fait assez froid).


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  •  Parce que le fait de ne pas maîtriser les techniques de base de la représentation graphique n'est absolument pas rédhibitoire et ne m'empêchera jamais de faire des trucs rigolos — ou du moins, des trucs qui me font rigoler, moi.

     Amis artistes, amis non-artistes ! Ce tutoriel s'adresse à tous : il vous permettra de réaliser un dessin de zèbre assez rapidement et sans prise de tête. Entrons tout de suite dans le vif du sujet !

     Bases indispensables : déjà, il faut que vous soyez en train de sourire. Sourire, c'est la preuve que vous êtes de bonne humeur. Si vous n'êtes pas de bonne humeur, je ne vois pas pourquoi vous voudriez dessiner un zèbre, et en plus, si vous le faisiez, il y aurait de fortes chances pour que vous ratiez votre dessin. Parce que votre zèbre sentira votre négativité et sera moche en conséquence.

     Donc, si vous souriez, vous pouvez commencer par vous saisir d'un stylo/feutre/crayon/machin-pour-faire-des-traits-sur-du-papier de couleur noire ou foncée. De préférence, un stylo/feutre/crayon/machin que vous aurez acheté (non pas que je sois contre le vol ; plus exactement, si, je pense que le vol c'est mal, mais ce n'est pas la raison pour laquelle je vous suggère d'avoir acheté votre stylo/etc.), puisque vous aurez également besoin d'un code-barre (en général, c'est fourni à l'achat du stylo/etc. ; mais sinon, regardez les 4èmes de couverture des livres de votre bibliothèque, vous devriez trouver). S'il y a de l'espace autour du code-barre, c'est top (passez à l'étape 2). Sinon, vous aurez besoin d'une feuille de papier et de ciseaux : et si votre code-barre ne se trouve pas sur un machin qui colle, vous aurez également besoin de colle.

     Je pense que vous voyez où je veux en venir, mais comme ce serait bête de conclure mon tuto avant même de l'avoir commencé, voici voici (faites attention à réaliser mes instructions en conformité avec le modèle présenté, afin d'obtenir un rendu réussi) :

     

     Étape 1 :  découpez votre code-barre soigneusement et collez-le sur votre feuille de papier en veillant à laisser de l'espace autour de lui. (Si le code-barre est issu d'une étiquette, il collera tout seul ; sinon, utilisez votre bâton de colle. Oui, je vous prends vraiment pour des idiots.)

     

     Étape 2 : dessinez les pattes du zèbres en faisant deux traits en forme de "V" à l'envers aux deux coins inférieurs du code-barre.

     

     Étape 3 : dessinez les contours d'une chaussette/botte à l'envers à partir d'un des coins supérieurs du code-barre. (Vous pouvez choisir le coin supérieur que vous voulez, et choisir l'inclinaison de la chaussette/botte que vous voulez : ça changera uniquement l'orientation (vers la gauche ou la droite) du zèbre et son port de tête. Attention, certaines inclinaisons de chaussette/botte peuvent donner des positions anatomiquement impossibles.)

     

     Étape 4 : faites un (gros) point en dessous de l'angle de la chaussette, un (petit) point en haut du bout de la chaussette, et un trait en dessous : ils représenteront respectivement un oeil, un naseau et la bouche du zèbre.

     

     Étape 5 : dessinez deux "V" à l'envers sur le sommet de la chaussette.

     

     Étape 6 : à partir du deuxième coin supérieur du code-barre, faites un trait droit ou courbe et s'achevant sur une petite larme : ce sera la queue du zèbre. (C'est le moment d'exprimer votre créativité : la queue du zèbre est extrêmement importante pour représenter l'humeur du zèbre, aussi je vous conseille d'être très soigneux lors de la réalisation de cette étape cruciale.)

     

     Étape 7 :  le long du cou du zèbre (la partie de la chaussette où il n'y a encore ni point ni trait), dessinez des rayures en faisant des traits épais et parallèles aux traits du code-barre, puis coloriez la petite larme de la queue.


     

     Étape 8 :  enfin, réalisez les sabots du zèbre en faisant des gros points à chaque extrémité inférieure des traits de vos deux "V" à l'envers.

     

     Et voilà ! Vous savez désormais dessiner un zèbre en à peu près 20x moins de temps qu'il ne m'a fallu pour réaliser ce tutoriel, c'est-à-dire, environ 30 secondes.

     

     Maintenant, je sais que vous pensez que je me fous de vos gueules, et que c'est vraiment trop con, comme tutoriel. Ben, en fait, non. Déjà parce que grâce à ce tutoriel, vous savez rendre des codes-barres rigolos et esthétiques. C'est extrêmement pratique pour agrémenter les codes-barres présents sur les cartes postales et les cadeaux que vous offrez à vos amis.

     Ensuite parce que ce tutoriel vous fournit une base non-négligeable pour dessiner un zèbre : si vous suivez bien les instructions (sans faire les petits malins en détournant les instructions volontairement), vous réussirez à tous les coups à dessiner un truc que tout le monde saura identifier comme étant un [dessin de] zèbre. Ce qui n'est pas forcément le cas avec les tutoriels compliqués qui vous demandent de faire pleins de détails qui, s'ils sont mal réalisés, peuvent gâcher la forme globale du dessin : or, c'est la forme globale du dessin qui va faire que les gens identifieront ce qu'il représente. Maintenant, vous savez représenter l'essence, l'idée globale du zèbre : c'est un machin avec des rayures noires et blanches, quatre pattes, une queue et une tête allongée qui pendouille au bout d'un cou assez long (mais pas trop).

     Qui plus est, la technique du code-barre vous permet, d'une part, de faire une grosse économie de temps en n'ayant pas à dessiner 90% des rayures du zèbre, mais aussi, d'autre part, de réaliser un zèbre presque unique puisque le code-barre est un enchaînement de rayures blanches et noires d'épaisseurs variables, qui change d'un produit à l'autre. Chaque zèbre réalisé avec un code-barre d'un produit différent aura donc ses rayures spécifiques !

     Enfin, ce tutoriel avait aussi pour vocation de vous rappeler qu'en dessin, il n'y a pas que la technique qui compte : car il s'agit aussi de représenter des choses, des idées, en jouant avec la multitude de possibilités (en matière de matériaux, textures, couleurs, points de vue, etc.) qui s'offrent à nous. Ce n'est pas très grave si vous ne savez pas dessiner un zèbre réaliste, tant que vous vous amusez à le dessiner ; et ce ne sera jamais raté, si votre dessin parvient à tirer son intérêt d'autre chose que son réalisme.


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  •  Après des années de lecture, d'écriture, de vocation littéraire plus ou  moins affirmée, de jeux avec les mots, après quatre mois de prépa littéraire, ça y est, enfin, je crois que je commence à toucher du doigt ce qu'est la littérature (oui, c'est vrai, ça : qu'est-ce qui fait qu'un livre est de la vraie littérature ?).

     Enfin. Soyons honnêtes : ce n'est qu'une esquisse de réponse, évidente mais pourtant foudroyante lorsque j'ai mis les mots dessus.

     Alors voilà : la littérature, c'est ce qui se relit.  C'est ce qui se relit parce qu'on aime ça, qu'on apprécie la beauté des mots, oui. Mais c'est encore trop simpliste (et pour faire mon élitiste : il n'est pas dit que tous aient un jugement éduqué). C'est ce qui se relit parce que c'est ce qui a beaucoup de choses à livrer. Parce que les mots n'ont pas que leur sens premier (comme s'ils avaient un sens premier, d'ailleurs). C'est ce qui se relit parce que c'est ce qui ne se livre pas immédiatement (et peut-être même jamais totalement). C'est un texte, au sens étymologique du terme, un tissu dont il faut démêler les fils. C'est quelque chose qui donne plus à voir que ce qu'on pourrait penser qu'il donne à voir.

     La littérature, c'est ce qui se relit, parce que ça se révèle à chaque fois, à chaque relecture.

     La littérature, c'est ce qui se relit, parce que ce sont des mots, au-delà des mots, parce que la beauté, la vérité, le jeu, le tonnerre qui s'incarnent en eux ne se trouvent pas tout à fait en eux mais aussi derrière eux, et en nous, aussi.

     La littérature, c'est une gifle de vent glacial qui vous réveille un matin, quand vous sortez de chez vous. Et vous vous dites wouah. Vous ne savez pas pourquoi, mais vous vous dites wouah. J'ai mis longtemps à comprendre. Je n'ai toujours pas compris (et c'est bien pour ça que c'est de la littérature). N'empêche que. Je crois que j'ai commencé à mettre le doigt dessus.

     La littérature, c'est un abîme abyssal qui s'offre à vous derrière les mots, c'est quelque chose de gigantesque, d'immense, d'énorme – un peu comme ma révélation sur la littérature. Je tiens un début début de réponse, et ça aussi, ce fut une belle gifle de vent glacial, parce que je venais de faire tomber un pan de mystère de la littérature, et que derrière j'y ai vu cette immensité et tous les mystères qu'elle apporte.

     (Et, bordel, j'aurais aimé être à la hauteur de cette révélation pour l'exprimer.)


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